Utiliser des cryptomonnaies au quotidien ? En pensant “payer en Bitcoin”, la plupart des Français imaginent une suite de complexités poussives réservées seulement à ceux qui aiment l’informatique. Sauf que des millions d’Européens les utilisent déjà pour jouer en ligne, envoyer de l’argent à l’étranger ou accumuler des points de fidélité transformables en argent réel. Une vraie adoption massive est en marche. Et cela tient au fait que les interfaces ressemblent de plus en plus à PayPal ou à votre appli bancaire habituelle. Les cryptomonnaies fonctionnent discrètement en arrière-plan, vous ne voyez que le service. Payer, envoyer, économiser : la preuve avec des cas d’usage bien concrets.
L’iGaming fait référence à ces jeux d’argent accessibles sur internet : les casinos en ligne bien entendu, qui proposent depuis quelques années les mêmes jeux que leurs équivalents physiques “de briques et de mortier”. Tables de poker et de blackjack, roulettes, loteries numériques, et quantité de machines à sous. Un marché récréatif qui pèse lourd en Europe.
Si le secteur a massivement adopté les cryptomonnaies, c’est pour une raison simple : elles résolvent les frictions récurrentes avec les banques traditionnelles. Les banques considèrent avec méfiance les paiements par carte et virements vers ces plateformes. Ou alors s’ils passent, un coup de fil de votre gestionnaire vient vous demander une explication, vous mettre en garde, etc. Pire, vos “habitudes à risques” (comprenez : jouer aux jeux d’argent) viennent parfois plomber votre scoring pour un éventuel emprunt immobilier…
Et ce, même si ces opérateurs ont une licence tout ce qu’il y a de plus valide au Royaume-Uni, Malte ou aux Pays-Bas ! Voilà pourquoi les cryptomonnaies ont tout de suite séduit les casinos en ligne. Ces monnaies numériques sont natives d’internet et leurs transactions se font sans autorité centrale, sans passer par une banque.
Aujourd’hui, l’écrasante majorité des opérateurs permet les dépôts et les retraits en Bitcoin, Ethereum et en Dollar de Tether (une crypto stable indexée sur le dollar). Le choix de l’opérateur dépendra donc de vos préférences, selon que vous utilisez un bitcoin casino ou non
pour jouer à votre jeu de prédilection (comme un tournoi de poker en live par exemple).Il vous suffit de faire une recherche sous le vocable “Bitcoin casino xxx”, “Crypto casino xxx”, plutôt que “casino en ligne xxx” tout simplement.
Les transferts d’argent à l’international représentent un parcours du combattant coûteux. Prenez les services Western Union ou MoneyGram : ils prélèvent entre 10 et 15% du montant envoyé, ce qui est une portion assez énorme ! Si vous préférez passer par votre banque traditionnelle avec un virement SWIFT, les frais fixes oscillent entre 30 et 50 euros, et il faut patienter 3 à 5 jours ouvrés pour que l’argent arrive à destination. Sans compter les week-ends où rien ne bouge…
Rien d’étonnant à ce que ces mêmes acteurs pensent aux cryptomonnaies, et en particulier au “stablecoins”. Ces cryptomonnaies particulières maintiennent une valeur stable, généralement alignée sur le dollar ou l’euro. L’USDC (USD Coin) et l’USDT (Tether) sont les plus répandus. Leur stabilité les rend parfaits pour les transferts d’argent : pas de mauvaise surprise avec une volatilité soudaine.
Le processus de transfert devient alors remarquablement simple. Vous téléchargez une application comme Binance, Coinbase ou même la fonction crypto de Revolut. Vous achetez des stablecoins avec votre carte bancaire, exactement comme vous rechargeriez un compte PayPal.
Ensuite, vous envoyez ces stablecoins à l’adresse crypto du destinataire, une longue suite de caractères qu’il vous communique, comparable à un IBAN mais pour les cryptomonnaies. Le destinataire reçoit les fonds en quelques secondes et peut les convertir ensuite en euros sur son compte bancaire.
Moneygram fait encore plus simple : il est possible de passer en agence, déposer des euros ou des dollars, activer le transfert en USDC, puis votre destinataire eu Europe ou en Asie reçoit l’argent… le stablecoin USDC servant uniquement de “rail financier” pour des frais largement plus faibles. Un tel succès que le système a été utilisé en masse par des utilisateurs inattendus, les touristes européens – qui “transportent” de l’argent d’un pays à l’autre et veulent éviter de passer par les banques…
Et Western Union s’apprête à lancer son propre stablecoin adossé au dollar, baptisé sobrement l’US Dollar Payment Token (USDPT)
. À chaque fois, un point commun, le stablecoin servant uniquement de rail pour permettre de bénéficier de frais réduits.Nous avons tous ce tiroir rempli de cartes de fidélité qu’on oublie d’utiliser. Points qui expirent silencieusement, impossibilité de les transférer à un proche, obligation de les dépenser dans une seule enseigne, etc. Pas toujours évident de tirer profit des programmes de fidélité traditionnels, ce qui crée autant de frustration(s) que de fidélisation.
C’est précisément ce problème que la tokenisation (transformation en actifs numériques) commence à résoudre. Le principe est le suivant : au lieu d’être stockés dans la base de données de l’entreprise, vos points deviennent des actifs numériques enregistrés sur une blockchain, essentiellement un registre numérique infalsifiable et transparent.
Cette évolution technique change tout, puisque vous devenez véritablement propriétaire de vos points, comme vous êtes propriétaire de l’argent sur votre compte bancaire. Carrefour fut l’une des premières à expérimenter cette approche avec des NFT (jetons non fongibles, qui sont des certificats de propriété numériques) pour certains aspects de son programme de fidélité.
Mais c’est Air France-KLM qui est le mieux avancé en la matière. Le groupe a étudié comment rendre ses miles Flying Blue transférables et échangeables contre des euros sonnants et trébuchants. L’idée n’est pas de compliquer l’expérience client, bien au contraire. Vous continuez à scanner votre carte en caisse, l’application mobile garde la même interface. Mais derrière cette façade familière, vos points acquièrent de nouvelles possibilités.
Imaginez pouvoir vendre vos points non utilisés avant qu’ils n’expirent, ou les échanger contre des miles Air France pour vos prochaines vacances. Ou encore les transmettre à vos enfants, ce qui est impossible aujourd’hui. Les analystes du secteur estiment que d’ici 2027, près d’un tiers des programmes de fidélité européens intégreront la crypto comme base technique, créant un véritable marché secondaire pour rendre vos points parfaitement négociables.
Et puis, comme toujours, c’est le commerce en ligne qui réussit à trouver des approches simples pour faire rentrer une innovation dans les habitudes du grand public. Avec la crypto, Stripe a trouvé un filon. Pour ceux qui ne connaissent pas, la passerelle américaine Stripe est probablement le système de paiement le plus utilisé au monde sans que vous le sachiez.
Cette entreprise américaine traite les transactions par carte bancaire pour des millions de sites web : Deliveroo quand vous commandez un repas, Booking.com pour vos réservations d’hôtel, Le Monde pour vos abonnements numériques, Zoom pour vos réunions vidéo, etc. Quand l’interface de paiement est fluide et moderne, c’est généralement Stripe qui opère en coulisse ! Stripe reçoit les paiements par carte bancaire de manière sécurisée, puis les reverse au commerçant sans que celui-ci ait jamais connaissance de vos coordonnées bancaires.
L’entreprise vient d’intégrer l’USDC, ce dollar numérique stable dont nous parlions pour les virements internationaux. Cette décision fut largement médiatisée car elle a ouvre la porte des paiements crypto à des millions de commerces sans qu’ils aient à devenir experts en blockchain. Pour un site marchand, activer cette option se résume à cocher une case dans son tableau de bord Stripe.
Les avantages sont multiples pour les commerçants. Les frais de transaction passent de 2,9% (carte bancaire classique) à environ 1,5% avec l’USDC. Les paiements sont instantanés. Pour vous, consommateur, l’expérience reste simple. Au moment de payer, une nouvelle option apparaît à côté de PayPal et de la carte bancaire : “Payer avec crypto” ou “Payer en USDC”. Si vous choisissez cette option, un QR code s’affiche. Vous le scannez avec votre application de portefeuille crypto, confirmez le montant, et c’est réglé.
Vos données bancaires ne transitent jamais sur internet, réduisant les risques de piratage. X (anciennement Twitter) utilise déjà ce système pour certains services payants, et des milliers de sites européens commencent à proposer cette option.
L’un des problèmes récurrents d’internet concerne les micro-paiements. Comment facturer 10 centimes pour lire un article ou 50 centimes pour écouter une chanson ? Avec les systèmes bancaires traditionnels, c’est peu évident : les frais minimums de traitement (environ 30 centimes plus un pourcentage) dépassent le montant de la transaction elle-même. De fait, beaucoup de services ne sont pas aussi rentables que l’on pense sur les tranches de montants inférieures.
Les cryptomonnaies changent cette équation économique. Sur des réseaux comme Polygon, Solana ou avec le Bitcoin Lightning Network, une transaction coûte moins d’un centime d’euro, quel que soit le montant envoyé. Cette caractéristique technique ouvre soudain des possibilités commerciales impossibles jusqu’ici.
Le navigateur Brave illustre parfaitement ce potentiel avec son système Basic Attention Token (BAT). Quand vous naviguez avec Brave, le navigateur comptabilise le temps passé sur chaque site. À la fin du mois, il distribue automatiquement des micro-paiements aux créateurs de contenu que vous avez consultés. Vous lisez régulièrement les articles d’un journaliste indépendant ? Il reçoit quelques centimes. Vous regardez les vidéos d’un YouTuber ? Il touche une micro-rémunération directe, sans publicité, sans intermédiaire.
Faut-il comprendre la blockchain pour utiliser les cryptos ?
Non, pas plus qu’il faut comprendre le protocole HTTPS pour acheter en ligne. Les applications modernes cachent totalement la complexité technique derrière des interfaces familières.
Mes cryptos peuvent-elles perdre de la valeur ?
Les stablecoins (USDC, USDT) gardent une valeur fixe par conception. Pour Bitcoin ou Ethereum, oui, la volatilité existe, d’où l’importance de les utiliser pour des transactions, pas comme investissement.
Est-ce légal en France ?
Totalement légal. Les cryptomonnaies sont régulées par l’AMF (Autorité des Marchés Financiers) depuis 2019 et imposables comme tout autre actif numérique.
Par quoi commencer concrètement ?
Un petit virement international via Moneygram, un achat de cryptos via Revolut ou encore un achat sur un site acceptant les cryptos via Stripe. Commencez avec quelques euros, vous vous familiariserez assez vite !